LA BIO-LOGIQUE DU SURMOI ou la peur de l’autre….LAURENT DAILLIE

l'autreSelon la psychanalyse, le Surmoi et une instance morale de la psyché qui se transmet par l’éducation afin de différencier le bien et le mal. Et si c’était plutôt une peur animale innée ? Et si notre « gendarme intérieur » était plus naturel que culturel ? Penchant pour cette explication éthologique et attribuant une origine archaïque à de nombreux sentiments (culpabilité, honte, remords, timidité…), Laurent Daillie vient d’écrire un livre pour étayer sa vision évolutionniste du concept freudien. L’auteur de la « Logique du symptôme » y expose que l’être humain redoute viscéralement le jugement d’autrui et le rejet social, situations qui équivalent à un danger mortel dans la nature et qui peuvent être, dans notre vie moderne, source de mal-être et de maladies.

CETTE PEUR  DIRIGE NOTRE VIE

La peur de l’autre est l’une des plus somatogènes : elle est bien souvent la cause première du blocage à l’origine du symptôme, qu’il soit physique, psychique et/ou comportemental. Considérant la gravité théorique d’une éventuelle sanction, nous consacrons l’essentiel de notre existence à nous en prémunir en sachant plaire à l’Autre et surtout ne pas lui déplaire. En permanence, sans nous en rendre compte, nous calculons toujours tout avec beaucoup de précisions pour le séduire et être irréprochables, le plus possible. Pour preuve, il suffit de considérer quelle question nous nous posons le plus souvent durant notre vie : « Que va-t-on penser de moi ? » ou devrais-je plutôt dire que notre cerveau nous fait nous poser. Il nous la suggère afin de nous abstenir de déplaire à l’Autre et d’être sanctionnables. Nous sommes tous concernés, sans exception, à tous âges, du plus humble au plus puissant, du plus fort au plus faible, à tous les niveaux et tous les échelons, de la naissance jusqu’à la mort. C’est une peur animale : aucun mammifère n’y échappe, surtout s’il appartient à une espèce sociale. Êtes-vous concernés ? Il est fort probable que vous découvrirez avant la fin de cette lecture combien vous l’êtes aussi. À moins de le faire tout de suite en vous reconnaissant parmi les principaux signes cliniques de cette peur :

  • vous êtes timide ?
  • vous rougissez facilement ?
  • vous êtes complexé(e) ?
  • vous vous justifiez sans cesse ?
  • vous vous excusez souvent ?
  • vous brillez par votre discrétion ?
  • vous craignez le jugement de l’Autre ?
  • vous protégez votre réputation ?
  • vous ne savez pas dire non ?
  • vous n’avez pas confiance en vous ?
  • vous ne vous sentez pas reconnu(e) ?
  • vous redoutez de prendre la parole en public ?
  • vous vous sentez coupable ?
  • vous avez honte de certaines choses ?
  • vous mentez parfois ?
  • vous êtes perfectionniste ?
  • vous êtes superstitieux ?
  • vous craignez Dieu ?
  • et cætera car la liste est beaucoup plus longue.

 Vous êtes donc aussi concernés et je m’en réjouis pour vous ! Cela signifie que votre cerveau primitif fonctionne très bien et vous protège efficacement puisque c’est la finalité de cette peur. Ne cherchez plus votre Ange gardien : vous êtes déjà sous la protection du plus puissant de tous. Cela dit, la façon qu’a notre cerveau de nous protéger peut poser quelques problèmes, des plus anecdotiques et risibles jusqu’aux plus handicapants et douloureux, en passant par les plus graves, voire mortels dans certains cas. Car les stratégies mises en œuvre, à notre insu le plus souvent, peuvent nous valoir de profonds blocages psychiques, jusqu’à en être malades.

 Nous sommes ….des mammifères sociaux

Ce simple fait explique pourquoi notre cerveau archaïque nous fait avoir aussi peur de l’Autre et de son éventuelle sanction, surtout en termes de rejet :

Nous sommes des mammifères : c’est très avantageux dans le sens où nous passons la première phase de notre développement dans le ventre protecteur de notre mère, laquelle ensuite nous nourrit et nous protège jusqu’à notre autonomie. L’inconvénient réside dans le fait que, dans la nature, nous n’avons aucune chance de survie si elle vient à disparaître ou si elle nous rejette.

Nous sommes des animaux sociaux : c’est très avantageux car l’appartenance à un groupe est synonyme de sécurité, l’union faisant la force devant l’adversité. L’inconvénient réside dans le fait que, dans la nature, nous sommes condamnés si le groupe disparaît ou s’il nous rejette, peu importe notre âge. De plus, la vie en société – animale ou humaine – n’est pas une sinécure car, pour le meilleur et surtout le pire, elle est hiérarchique. C’est presque toujours la loi du plus fort qui prévaut et le plus faible doit se soumettre pour ne pas être exclu ou violenté.

Qui est l’Autre ?……..C’est aussi nous-mêmes

Avant de poursuivre, il faut faire connaissance de cet Autre dont nous avons tellement peur qu’il puisse nous sanctionner. Il est omniprésent, il nous accompagne en permanence, sans que nous le sachions. Mais c’est un personnage difficile à cerner car il peut être réel, conceptuel, virtuel ou imaginaire :

L’’Autre primordial pour un mammifère est évidemment sa mère sans laquelle il ne peut pas survivre. Ensuite, ce peut être un individu de la même espèce, les membres de sa communauté s’il est un animal social, son père et sa famille dans quelques cas, dont le nôtre.

L’Autre est la personne avec laquelle nous sommes concrètement en relation, en face à face, au téléphone ou par écrit. Ce peut être un parent ou un proche, un voisin ou une collègue, un inconnu assis en face de nous dans le train ou un quidam au milieu d’une foule dont nous croisons le regard juste une seconde.

L’Autre peut être une personne que nous ne connaissons pas et ne rencontrerons peut-être jamais. Ainsi par exemple, je m’applique en ce moment à vous plaire et ne pas vous déplaire en écrivant ces lignes alors que nous ne serons peut-être jamais en relation d’aucune manière.

L’Autre peut être une personne tout à la fois concrète et indéfinie dont nous pouvons craindre le jugement et/ou la sanction. Ainsi par exemple, tous les automobilistes ont peur du gendarme ; et on peut craindre l’inconnu(e) qui corrigera notre copie d’examen, l’inspecteur du travail ou le contrôleur des impôts.

L’Autre peut être cette personne indéfinie usuellement nommée « On » dont nous craignons le regard et le jugement, ce qu’elle peut penser ou dire de nous. Qu’en dira-t-on ? Que va-t-on penser de moi ? C’est un peu comme si « On » pouvait tout savoir de nous et de nos turpitudes.

L’Autre peut être une entité. La justice dont nous devons craindre la sanction ; la hiérarchie qu’il faut respecter ; la communauté dont il ne faut pas être exclu ; l’organisation dont il faut suivre les règles, etc. Ce peut être aussi une entité maléfique menaçant les personnes superstitieuses à laquelle il ne faut pas déplaire.

L’Autre peut être Dieu pour les personnes croyantes, celui auquel on ne peut rien cacher, jusque dans l’intimité de la pensée. En sachant que pour notre cerveau archaïque, Dieu est potentiellement dangereux si l’on a peur de Lui, proportionnellement. Mieux vaut-il donc le considérer comme un guide bienveillant plutôt qu’un père fouettard.

L’Autre, ce sont les éducateurs de notre enfance dont nous craignons encore le jugement et l’éventuelle sanction sans nous en rendre compte : un parent, un proche, un enseignant, etc. En général, ce sont des personnes dont nous avons eu peur et/ou voulu/dû nous faire aimer.

L’Autre peut être une personne ayant eu beaucoup d’influence et dont nous nous efforçons de suivre l’enseignement, avec ou sans conscience. Ce peut être un parent charismatique, un grand frère au sens propre ou figuré, un mentor ou un guide spirituel.

L’Autre peut être une personne décédée depuis parfois très longtemps mais toujours omniprésente dans notre esprit au point de nous demander souvent ce qu’elle penserait de nous, comme si elle était toujours là pour juger nos actes.

L’Autre peut être une personne traumatisante dont nous continuons à avoir peur, avec ou sans conscience, même si elle ne peut plus nous nuire. Ce peut être un père violent, une mère intransigeante, un enseignant sévère, un conjoint sadique, un patron tyrannique, un agresseur, un violeur, etc.

Enfin il est un Autre particulièrement redouté à qui, en permanence, nous nous efforçons de plaire et surtout ne pas déplaire. Il est omniprésent, omniscient et omnipotent ; il sait absolument tout de nous et il est parfois implacable : il s’agit de nous-mêmes ou, plus précisément, de notre conscience. Elle est comme une tierce personne qui nous observe et juge nos actes, nos intentions, et donc nos pensées. Nous pouvons être sans pitié pour nous-mêmes, notre pire bourreau, le plus impitoyable de tous. On peut s’infliger de terribles sanctions, se condamner à la prison à perpétuité et même à la peine de mort. Des personnes vivent ad vitam enfermées dans leur culpabilité et certaines se donnent la mort pour y échapper. Nous sommes en général très exigeants vis-à-vis de nous-mêmes et, de ce fait, nous avons fréquemment mauvaise conscience ou peur de mal agir et donc d’être coupables. Or, s’il perçoit la moindre culpabilité effective ou éventuelle, notre cerveau archaïque nous croit en danger, menacé d’une sanction que seul l’Autre peut nous infliger : il faut bien le comprendre.

C’est le surmoi, c’est-à-dire la conscience de soi face au bien et au mal. Mais il se définit toujours en fonction de l’Autre, de celui qui peut éventuellement nous sanctionner. Le fond du problème n’est donc pas le bien ou le mal mais l’éventualité d’une sanction. C’est du moins mon avis et le propos de ce livre.

Extraits du livre : « La Bio-logique du Surmoi », Laurent Daillie, Éditions Bérangel. Ouvrage disponible dans la Médiathèque Néo santé  (Source Néo Santé N° 42)

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THERAPEUTE HOLISTIQUE : NATUROPATHE ENERGETICIENNE ⭐ ORGANISATRICE D'EVENEMENTS COMMUNICATION